vendredi 20 février 2015

MILITARIA hors série


Auteur : Yves BUFFETAUT (dessins de Jean RESTAYN) - Editeur : Histoire & Collections

 

Comme je l'ai écrit dans ma chronique du livre de Peter Taghon, le monde francophone de l'édition de livres et revues sur la seconde guerre mondiale s'est mis à exploiter professionnellement, depuis une bonne vingtaine d'années, les fonds d'archives photographiques existant dans le monde. Il n'y a qu'à rentrer dans une librairie aujourd'hui pour constater la pléthore de magazines (souvent redondants) édités sur le sujet. Parmi les précurseurs dans le genre, la revue Militaria publie un hors série trimestriel sur les batailles de la seconde guerre mondiale depuis le début des années 90. Chaque numéro est consacré à une bataille ou campagne particulière et est axé sur une reproduction de qualité de clichés d'époque (une centaine). Il est également agrémenté de planches en couleur des matériels utilisés par les belligérants, réalisées par le talentueux Jean Restayn, qui constituent une excellente base documentaire pour la peinture des véhicules et autres canons. Bien que la série est censée aborder toutes les batailles entre 1939 et 1945, la campagne de Normandie revient bien (trop) souvent.
Au niveau des regrets, il est dommage que les dessins n'incluent pas d'uniformes et que les fautes de français parsèment régulièrement le texte (mais ceci est vrai pour la presse spécialisée en général).

LA CAMPAGNE DE L'ARMEE BELGE EN 1940


Auteur : Chevalier Edmond de Fabribeckers - Editeur : Rossel

 
Voici sans aucun doute le complément idéal du livre de Peter Taghon décrit ci-avant. Le Chevalier Edmond de Fabribeckers est un des rares auteurs – sinon le seul - qui s'est attelé à l'écriture d'une histoire complète de la campagne de l'armée belge en mai 1940. Paru une première fois en 1974 puis réédité en 1978, cet ouvrage décrit la situation militaire de la Belgique, la situation internationale à la veille de la guerre, le plan de mobilisation de l'armée puis les différentes phases de la campagne des 18 jours. La lecture du texte (parsemé de quelques dessins de James Thiriar, plus connu pour ses crayonnés sur la bataille de Waterloo) est prenante et l'on se rend compte au fil des pages des conséquences de l'impréparation de l'armée à l'aube de la guerre. L'auteur égratigne d'ailleurs à plusieurs reprises les autorités politiques et militaires pour leur imprévoyance et leur vue à court terme. Au final, ce livre est LA référence sur le sujet et, à cet égard, on se demande bien pourquoi il n'est plus édité.

WATERLOO 1815 – Les carnets de la campagne

Auteurs : B. Coppens, P. Courcelle, P. Meganck, J.J. Pattyn, J.P. Tondeur - Editions de la Belle Alliance



Cette série de monographies est à mon sens le must absolu pour tout amateur de la bataille de Waterloo. Le principe de cette collection est d'associer un texte de grande qualité à une iconographie somptueuse. Les auteurs ont puisé dans les sources de première main, c'est-à-dire les écrits et comptes rendus des acteurs de la bataille, en les confrontant ou les recoupant pour essayer de dégager la vérité.
A cela s'ajoutent de magnifiques reproductions de gravures, dessins, aquarelles et tableaux et surtout les superbes planches uniformologiques de Patrice Courcelle, indispensables pour les peintres de figurines.

ATLAS DES GUERRES

Auteurs divers - Editeur : Autrement



Les éditions Autrement ont pris le parti il y a quelques années de traduire une série d'ouvrages anglo-saxons sur les guerres à travers l'histoire, depuis la haute antiquité jusqu'au XXIème siècle. Cette série met l'accent sur la qualité de l'iconographie (illustrations, cartes, dessins). La collection, qui aurait dû compter 24 volumes, a semble-t-il été abandonnée en cours de route ; ainsi, il n'y a pas de volume sur la guerre au moyen-âge, sur la haute antiquité ou sur l'après guerre froide. Chaque album est l’œuvre d'un auteur différent et par conséquent tous ne présentent pas le même intérêt : certains sont très réussis car le texte a pris en compte les recherches historiques des dernières années tandis que d'autres véhiculent encore des idées reçues largement démenties actuellement ou négligent certains aspects de la période traitée. Mes préférés sont ceux sur les guerres de la Renaissance, sur la marine à vapeur et sur les guerres grecques.

MAI 40

Auteur : Peter TAGHON - Editeur : Racine



A partir des années 90, de plus en plus d'auteurs francophones se sont mis à utiliser les immenses fonds photographiques de la deuxième guerre mondiale. Jusqu'alors, contrairement au monde anglo-saxon, les ouvrages en français sur cette période réutilisaient toujours les mêmes clichés à satiété, souvent mal reproduits et surtout très mal commentés (situation géographique et chronologique, unités). Parmi les précurseurs qui ont commencé à exploiter convenablement les millions de photos existantes tant dans les archives officielles (bundesarchiv, IWM, ECPA, etc) que privées, Peter TAGHON, en préparant son livre sur la campagne de mai 1940 en Belgique, a mis un point d'honneur à localiser très exactement chaque cliché, n'hésitant pas à se rendre sur les lieux même de l'action. Par sa connaissance de la période, du matériel et du déroulement des évènements, et en sélectionnant de préférence des photos issues de collections privées d'anciens combattants, il a donné naissance à un ouvrage de référence qui donne un éclairage unique sur cette campagne.
Il a poursuivi son travail avec deux autres monographies de grande valeur : une sur la libération de la Belgique et une sur la bataille des Ardennes. Malheureusement (et on se demande bien pourquoi), ces trois livres remarquables ne sont plus édités à l'heure actuelle.

jeudi 19 février 2015

L'INVENTION DE LA GUERRE MODERNE

Auteur : Colonel Michel GOYA - Editeur : Tallandier/collection Texto
 
 
 
Réédition d'un ouvrage paru il y a quelques années sous le titre « La chair et l'acier », « L'invention de la guerre moderne » est une étude de l'évolution de l'armée française durant la première guerre mondiale. Profondément marquée par la défaite de 1870, l'armée française est à la recherche d'une nouvelle doctrine. Dans l'esprit des militaires français, la défaite contre la Prusse est due principalement à une culture de la défensive qui prévalait alors. Les différentes écoles de pensée de l'après 1870 prônent l'offensive à outrance, au mépris de l'évolution technologique des armes à feu. On croit dur comme fer aux vertus des charges à la baïonnette, malgré les enseignements des grands conflits de l'époque (guerres russo-turque, du Transvaal, de Mandchourie, ...). Encore faut-il formaliser cette doctrine afin d'instruire les troupes. Les règlements se succèdent donc à un rythme effréné et les manœuvres sont organisées pour correspondre à la doctrine, ce qui aboutit à des exercices totalement irréels, où l'on voit des vagues de fantassins charger et enlever des positions défensives garnies de fusils à répétition sans coup férir. Le premier tiers du livre de Michel Goya est consacré à cette évolution doctrinale (mais vu les qualités d'écriture de l'auteur, on ne s'ennuie absolument pas), sans négliger celle des armes (infanterie, cavalerie, artillerie) et des armements. Il en vient ensuite à la confrontation de la doctrine avec la réalité de la guerre et au désastre d'août 1914, mais met aussi en exergue les facultés d'adaptation des troupes françaises qui leur permettront de vaincre sur la Marne et de stabiliser le front. Le fil rouge du deuxième tiers de l'ouvrage reste l'évolution et l'adaptation doctrinale, où l'on comprend que, jusqu'à l'arrivée du général Pétain à la tête du GQG en mai 1917, « l'offensive à outrance » reste l'obsession des grands chefs (avec toutefois une adaptation de l'art opérationnel, de la tactique et des moyens). M. Goya démontre également l'impact de la guerre des tranchées et des avancées technologiques (l'industrialisation de la guerre et les innovations techniques et tactiques, souvent imaginées par les soldats du front) sur la pensée militaire. La dernière partie du livre nous explique l'évolution de l'armée sous l'impulsion de Pétain (réorganisation, instruction, développement des nouvelles armes – aviation, chars) qui aboutit à la grande armée française de 1918. En conclusion, « L'invention de la guerre moderne » est un livre passionnant, qui permet de comprendre les transformations de l'armée française au cours de la guerre. Loin de s'en tenir à des considérations théoriques, l'auteur puise tout au long de l'ouvrage dans les réalités et l'expérience vécues par les poilus pour élaborer ses thèses. On ressort de cette lecture avec une vision bien plus élargie de la guerre 1914-18.